La Louis Bonnet

Comme vous avez un peu de temps pour lire, 

voici l'histoire de la voiture Louis Bonnet reconstruite par mon oncle entre 1954 et 1964 :


La "voiture" Louis Bonnet de 1886
découverte et reconstruite par mon oncle







Moi à la queue de vache à Retromobile 2000 (à droite >Marc Nicolosi)



https://www.leberry.fr/feux-18300/loisirs/l-une-des-plus-anciennes-voitures-fabriquees-en-france-de-retour-a-feux_12960540/#refresh

lorsqu'il a décidé de la vendre, Robin Loder me l'a proposée, mais pas le budget, ni la place, maintenant elle est retournée où elle est née.
j'avais rencontré Monsieur Bonnet au Retromobile où j'avais présenté la voiture reconstruite par mon oncle, parti de quelques bouts de ferrailles très corrodées et 3 photos, dans l'article, pas un mot sur les dix ans de travail de mon oncle !
Et pourtant :
BAUGY le 26 Octobre, 1964.
Voiture automobile ayant-appartenu à Monsieur Louis BONNET
Texte de Monsieur Eugène BRANCHEREAU-
20 rue St Martin    I88OO BAUGY.
Occupé à réaliser un motoculteur-en octobre 1954 dont les pièces m’étaient fournies par le brocanteur de Couy    Monsieur Jacquemin    celui-ci m'informe qu'il avait une vieille voiture à casser..."- C'est plein de cuivre c’est la plus vieille de toutes.... - Voyons" je peux la voir ?          Non !   Si vous venez on ne l’aura pas !   Surtout ne la casse pas !
Impossible d'en savoir plus ...Jacquemin est impénétrable en affaires A quelques jours de là , arrivée de Jacquemin C'est le jour on y va 1 Nous allons dans sa camionnette au Château de Grimonville au nord de Sancergues propriété de la famille Bonnet.  Là je vis près d'un énorme tas de ferrailles , celles de la ferme depuis des générations l'on passait des chevaux aux tracteurs au milieu d'éclats de bois quelques débris de métal , c’était les restes de la vieille voiture Jacquemin voyant ma mine se mit à rire .... Furieux "Qui a fait çà !!! ... Le basse-courier (Mr Desforges) : C’est moi !    Il en entendit de  vertes et précises
Si bien que Mademoiselle Bonnet   sortit du château pour nous dire que la voiture avait été celle de son oncle Louis Bonnet    la première à avoir traversé Paris.        « Je veux bien vous la  vendre, en cet état ! »
Ceci en présence de son frère Monsieur Louis Bonnet , de Monsieur et Madame Desforges, de Jacquemin et du transporteur.  Jacquemin acheta les débris que nous mîmes dans sa camionnette. Au retour j’achetais l'ensemble.
En avril I955 après bien des hésitations je décidais de reconstruire si possible cette voiture . Un bloc de rouille !
Mademoiselle Bonnet me confia trois photos et m’autorisa à les reproduire. Je fis le plus de recherches possibles , J'adressais une lettre avec Photos au Conservatoire des Arts et Métiers le IO Mai 1955 sans réponse. Puis à l'Auto-Journal le 28 Juin I955 avec réponse de Monsieur De Nève Président de l'Association des Vieilles Voitures. Ainsi qu'à Monsieur Malartre du Musée de Lyon le 26-7-55 , dont J’eus la visite du représentant suivie d'une offre d'achat.
A Sancergues une institutrice retraitée me confia que sa mère avait vu fonctionner la voiture de Mr Bonnet , revenant de La Charité sur Loire. J'ai lu une grande quantité d'ouvrages sur l'automobile , je n'ai trouvé traces que de celle de Lenoir à la Centrale à Gaz de Clichy d'où vient effectivement cette voiture. Suivant Monsieur Zérolo ingénieur, civil des mines sur "Son Manuel Pratique d'Automobilisme » édité par Garnier :  En Septembre I863 Etienne Lenoir avait construit une voiture munie d'un moteur à essence C'est la citation la plus précise que J'ai rencontré. Il me faudra quatre années pour reconstruire la voiture tout boulon dévissé se brise ainsi que la bride qui tient les cylindres le fer est fibreux et cassant presque de la fonte , tout est fragile.
Les pistons dans les cylindres sont tellement bloqués qu'il me faut la presse de l'huilerie pendant un mois pour les décoller....
La rouille a pénétré les chemises de cinq millimètres ..la chaîne un jeu de patience .. Surtout ne pas casser ..Les axes de roues sont un bloc..
Ne rien démonter en trop .. Le cône étagé de la poulie arrière étant brisé , je le fis reconstruire à Chaumoux Marcilly chez Monsieur Millet dont le père se souvint que jeune berger il avait vu Mr Bonnet modifier sa voiture : Roues avant , réservoir à essence La comparaison des bois indique un vieillissement différent.).
En I959 la voiture reconstruite je me rendis à Grimonville pour invite Mlle Bonnet et son Frère à venir à Baugy pour avis . Ce fut Mr Desforges auteur de la destruction qui vint Il me déclara fort surpris qu'elle était comme avant , mais ne lui connaissait pas le Ca pot fait suivant les photos . Lorsque Je rendis les photos originales à Mlle Bonnet en I960
Elle me donna avec son Frère les renseignements suivants son oncle Louis Stanislas Bonnet est né à Sancergues en 1852 mort le 4 Juillet I902 à Grimonville . Il sortit en I882 son automobile de la Centrale à Gaz de Clichy où son cousin Monsieur Supplisson était ingénieur au gaz de la ville de Paris.  Il était originaire de Sancerre.
Dans cette centrale tournait un moteur horizontal dû à Etienne LENOIR (I822 - I900)
Mlle Bonnet me confirma au dos d'une photo première voiture de Monsieur Louis
Bonnet vers l882 modifiée en I889 (carrosserie , roues avant –distribution d'essence).
Se rendant à la gare de Lyon pour y être embarquée à destination de la gare de La Charité sur Loire puis de La Charité par ses propres moyens elle est venue à Grimonville'.  Signé :., Jeanne BONNET.
Ayant demandé si la date de 1882 était la date de fabrication "Non 1 Elle a été faite bien avant , mais je ne peux donner la date d'origine  I882 est la date de la photo de Clichy . Les deux autres ont été prises à Grimonville vers I889 . Je dois vous dire, qu’au cours de l'hiver 1943 - 44 un officier allemand est venu à Grimonville  il demanda à voir la vieille voiture , il préleva une bougie et disparu.
Fait confirmé par Mr Louis Bonnet Monsieur et Madame Desforges il est très curieux que les allemands connaissent l'existence de cette voiture...
Je me suis rendu  à Sancerre, et, avec le Maire Monsieur Maurice Guerry nous avons rencontré Mlle Supplisson nièce de l'ingénieur au gaz . Au vu des photos par trois fois Elle nous affirma que c'était bien cette voiture la plus ancienne dont Elle avait entendu parler par son oncle.-
Je revins vers Mlle Bonnet et suite de mes lectures lui parlais de la voiture de Delamarre - Debouteville , sa réaction fut très vive : Mon Oncle s'est disputé avec lui 1 Il avait copié-sa voiture Si la voiture est celle de Lenoir il en avait le droit : vingt ans..
En observant la bougie l'on voit que celle-ci est faite à la main ;le filetage des deux bougies est différent le bronze de même nature que :ta culasse.  Mlle Bonnet me précisa :     «-Ce sont des bougies à étincelles »
Caractéristiques de la voiture de Louis Bonnet : Moteur : 2 cylindres horizontaux le moteur fut placé sous des angles divers suite d'essais...Alésage : 70mm, Course .: I60mm Cylindrée : 1.230 cm3 Soupapes commandées par pignons réducteurs I/2 et par balancier.  Soupapes d'échappement commandées , admission automatiques.  Carburateur à mèche de coton niveau constant par tube plongeur venant du réservoir à essence fermé (sous la pression atmosphérique).
Le premier modèle était un carburateur alimenté par le retournement d'une bouteille en verre contenant l’essence. Une seconde identique assurait le fonctionnement en continu...
Allumage par piles et bobine d'induction, rupteur par came sur l'arbre du moteur. Bougies porcelaines taillées à la main et serrées par un écrou.  Entraînement par poulies étagées avec cônes de raccordement trois vitesses avant par glissement de la courroie celle-ci commandée par un levier à: étrier en fer placé devant le conducteur .Le cône arrière transmet le mouvement par un crabot sur l'arbre de chaîne et à l'arbre moteur par la grande couronne dentée sur l'arbre de roues au différentiel.
La commande du crabot se fait par le levier en fer placé à la droite du conducteur.  Le frein sur différentiel est à bande de fer recouverte de cuir, la commande est un levier en bois placé à la gauche du conducteur.
La direction se fait par un levier dit queue de vache en fer agissant sur les roues avant suivant l'épure de Jeantaud
La vitesse est réglée par un régulateur à boules et, peut être modifiée par l'action du pied sur l'extrémité de la tige du régulateur.
Un interrupteur permet de mettre le courant piles ou de le couper pour l'arrêt. Le graissage des têtes de bielles se fait par des graisseurs à pression constante par ressorts, des paliers par stauffers les cylindres et pistons par des entonnoirs avec coton de retenue remplis à la burette.
Refroidissement à eau par chemises en zinc soudées.'
La voie avant est de 1m30 s la voie arrière de 1 mètre, entre essieux 1m50. Roues avant diamètre de 0m70, roues arrières fil boudin plein diamètre de 0m94. La largeur de la voiture est de 1m50 sa longueur de 2m75 et sa hauteur de Im50

Certifié véritable à Baugy le 26 Octobre I964.
Par Monsieur Eugène BRANCHEREAU                  
Déporté-interné Résistant.


Au départ, et du fond de son Berry natal, mon oncle était persuadé qu'il s'agissait de la fameuse voiture "Lenoir", donc les plans sont ainsi marqués, bon, c'était dans les années 50, et les moteurs de recherche étaient assez peu nombreux ! 





récupération par Monsieur Jacquemin en 1954 :


le travail de mon oncle  pour réaliser des miniatures à la chaîne :










les personnages sont sculptés au couteau dans un morceau de buis, ils reprennent les personnages de la photo.



Les roues avant ont été réalisées en buis, sur un tour semi-automatique, avec les outils fabriqués par mon oncle, puis il a construit une machine pour "extruder les quartiers d'orange" entre les rayons avec deux pièces femelles (avec les trous) une de chaque côté pour pas que le bois éclate, et une pièce en empreinte pour venir découper en une fois les 10 quartiers ! Le tout en forme exacte de la roue pleine.
pour les roues arrières, il s'est aperçu que le tuyau d'échappement en alu de la DS Citroën faisait exactement le diamètre au 43ème, il a alors construit deux machines : une pour découper et courber la jante, l'autre, une espèce de machine à coudre pour perforer la jante avec le nombre exact de rayons !
Lorsque l'on fait avancer la voiture, le moteur tourne, et les pistons bougent comme sur l'original !
Pas mal, non ?

Robin Loder l'a pas mal modifiée, malheureusement, pour "rouler" réservoir + gros, réservoir d'eau, avec modification des "chambres d'eau", etc.
Origine, avec pièces d'époque, conformes aux photos :

revue par Robin Loder :


la même au 43ème, réalisée par mon oncle :

Un sacré morceau de l'histoire de l'automobile et par là-même de notre civilisation !

Merci.

Olivier.

félicitation a ton oncle et merci pour la page d histoire.

Merci Olivier et Julien

Mon oncle avait un sacré caractère, mais il adorait transmettre, j'ai commencé vers 10 ans à apprendre à balayer correctement l'atelier !
Mais ensuite, à limer, "en creux" l'oncle me montrant qu'une lime est légèrement bombée (à l'époque!), et lui, premier prix d'ajustage à l'école d'enfants de Troupe de Tulle, arrivait à faire une surface parfaitement carrée, avec un léger creux en son centre, à la lime, il mettait une goutte d'huile, et celle-ci restait bien au milieu ! Moi, j'ai un peu fait un léger creux… au bout de + d'une heure d'établi !
J'ai aussi appris à tourner, fait des quilles, en bois, en laiton, fraiser, souder à l'autogène avec "la marmite du diable" comme l'appelait mon oncle, le générateur d'acétylène à carbure. et aussi le ciment, le plâtre et plein d'autres choses.
On a même construit un kart pendant les vacances sur base d'une Vespa et d'un train avant de 6cv Renault :



Il m'a communiqué sa passion de la mécanique et des véhicules anciens.

Dès que je bricole, je pense à lui, et je le remercie de m'avoir appris tout ça.


Un souvenir, la pince universelle qu'il a réalisée en première année de l'école des enfants de troupe :









en deuxième année : un étau à main, 
en troisième année : un étau à pied, avec ressort forgé,
ces pièces sont toujours dans la famille.
Pour son chef d'œuvre de dernière année, il a fait un tube carré, avec un cube pouvant s'insérer dans toutes ses faces, "il refoulait l'huile", Le commandant de l'école l'a conserver comme modèle sur son bureau pour montrer ce qu'on pouvait réaliser à la lime.

Je pourrais encore vous en parler pendant longtemps, il était très créatif, en tant qu'ajusteur et passionné d'armes, il avait recréé entièrement la platine d'un pistolet à pierre à deux coup en faisant la symétrie de la platine existante, après vieillissement (il l'avait mise dans le jardin, et on devait aller pisser soigneusement dessus chaque fois qu'on avait envie ! ), il était impossible de savoir quelle était la "neuve".

Merci de votre cordiale attention

Bonne journée !

Sacrées histoires! Merci.
Ma passion de la mécanique vient aussi d'une personne que j'ai fréquenté quand j'étais gamin. Ce monsieur travaillait avec mon père, il était extrêmement doué en mécanique et constructions en tout genres. Aucune panne ne lui résistait, il démontait tout et était capable de tout remonter. C'était un autodidacte, qui n'avait pas fini son école primaire. Il ne savait pas écrire et je ne l'ai jamais vu lire un manuel ou une notice. J'adorais regarder ce qu'il faisait.

 Merci pour le partage...

Merci à vous,

j'avais une Fiat 600D, qui n'avait plus beaucoup de compressions, mon oncle a décidé qu'on allait ouvrir le moulin pour "voir ça", ce qui fu fait, effectivement, les pistons et segments étaient fatigués, quand il a vu le prix de 4 neufs, il a fait un bond, et chez un copain garagiste, a trouvé des segments du bon diamètre, mais plus épais au niveau section, mais ils n'étaient pas chers ! Mon oncle m'a dit de les acheter, et quand le garagiste lui a dit : "ça ne va pas se monter", l'oncle lui a dit mais si, on va adapter tout ça !

Retour à l'atelier, tournage des 4 pistons pour approfondir les gorges des segments, du coup il m'a dit si un jour ça fume blanc, tu la jettes !

Remontage, j'ai fait plus de 10.000 bornes avec et un jour, en rentrant chez moi, à 100 mètres de la maison, j'ai eu la mauvaise idée de rétrograder : ça a fait un bruit bizarre, et un belle fumée blanche, j'ai déculassé : il y avait 3 têtes de pistons en haut, une en bas , j'ai appuyé sur celle de trop, elle est descendue toute seule ! 
Exit la Fiat 600, comme en plus elle commençait à présenter des problèmes de freinage, ...

C'est une grande et belle chance d'avoir, lorsqu'on est môme, un ancien qui vous montre le chemin de sa propre passion.

Mon père était un type bien, mais pas bricoleur pour un sous, son truc c'était la forêt, les bois et ce n'était pas mon goût.

Mais quand on est enfant, on ne se rent pas forcément bien compte de cette chance.

Olivier.

Bel hommage que tu fais là , Michel
J'ai tout lu depuis le début sans en perdre une miette, c'est vraiment extraordinaire !

Merci pour ce très beau partage et ce bout de toi-même que tu nous donnes !

Merci à vous,
si ça ne vous ennuie pas je vous mettrai ensuite un peu de l'histoire de la vie (difficile) de mon oncle pendant sa jeunesse et+

tiens si vous ne connaissez pas voici l'engin sur lequel les ébauches des roues avant en buis de la maquette au 43/ème ont été réalisées par l'oncle (qu'on appelait tous Parrain, et même toujours quand on en parle, car il était le Parrain du premier de mes frères, on est 5, 4 frères, une sœur).

le tour semi-automatique des années 20, utilisé par mon oncle (entre autres !) pour créer les ébauches des roues avant de la miniature en buis :









ça doit être assez peu courant, je n'en ai jamais vu d'autre.
le levier de gauche permet d'avancer l'ensemble tournant, et le levier à 4 branches permet de faire tourner la tête à six pans pour présenter les différents outils, chcun ayant la profondeur préréglée avec les vis visibles à l'extrême droite du plateau : il y a du boulot pour affiner les réglages, mais quant c'est ok, ça dépote.

A suivre

je n avait pas fait attention a l échelle de la maquette, 1/43, c est tout petit, un vrai boulot d horloger
belle outil qu un tour, un jour, faudra que j apprenne a utilisé ce genre d engin...

Beau temoignage

Merci Philou

ça, c'était son tour un américain de 1920 :

Ces outils m'ont toujours fascinés , certainement parce que pour moi ils conservent une part de mystère et d'admiration pour leurs "conducteurs". Un de mes voisins a un atelier de mécanique générale et j'adore me glisser dans son foutoir qui sent bon l'huile et les copeaux chauds

Le générateur d'Acétylène, ça avait cette tête là :

Pour revenir sur mon cher Oncle, "Parrain", vous trouverez ci-dessous le récit de son intégration (forcée!) à l'Ecole d'Enfant de troupe de Rambouillet, puis de Tulle, ainsi que la vie qu'il a vécut.
La vie était un peu différente à l'époque !

https://drive.google.com/open?id=1v9cIihV-t4udEmXdrdcflxivrDoDfbBV